[Lu !] La trilogie des Falsificateurs d’Antoine Bello
THRILLER – Sliv Dartunghuver, fraîchement diplômé de géographie, est recruté par le cabinet d’études environnementales Baldur, Furuset & Thorberg. Mais, très vite, il est approché par une organisation secrète : le CFR, Consortium de Falsification du Réel. Ce dernier, dont la finalité demeure mystérieuse, falsifie en permanence le réel : modifications ou inventions de documents, altération de chiffres, créations de personnes imaginaires, le CFR met tout en œuvre afin que ses « dossiers » se fondent avec la réalité. Sliv, dont les principales compétences sont l’imagination et la créativité, s’emploie alors à gravir les échelons de l’organisation dans l’espoir de découvrir un jour les vrais objectifs du CFR.
Si l’on ne devait reconnaître qu’une qualité à la trilogie des Falsificateurs – composée des Falsificateurs, des Éclaireurs et des Producteurs –, ce serait sans conteste son sens du divertissement : tome après tome, les aventures de l’islandais Sliv Dartunghuver nous entraînent avec une facilité déconcertante aux quatre coins du globe et nous passionnent durant de longues heures de lecture.
Non pas que l’écriture d’Antoine Bello soit transcendante ; mais le cœur de l’histoire, le CFR, constitue quant à lui une belle trouvaille narrative. Ce Consortium de Falsification du Réel, organisation secrète qui emploie Sliv sous couvert de divers postes, est un prétexte à de multiples péripéties et à de nombreuses pépites romanesques. Ainsi l’auteur fait-il habilement coïncider son roman avec des faits véridiques, inventant des falsifications et des détournements de la réalité qui raviraient les complotistes en tous genres. Le lecteur prend ainsi un plaisir assumé à se plonger dans tous ces dossiers du CFR, qui ont pour objectif de modifier la réalité – pour un monde meilleur ? Rien n’est moins sûr.
Si le récit se révèle intéressant, les personnages ne sont pas en reste. Tout d’abord, Sliv, le narrateur et protagoniste principal, est un atout non négligeable : très humain – dans ses qualités comme dans ses imperfections –, sûr de lui sans être (trop) insupportable, ambitieux mais faillible, amical et sympathique, il se montre souvent attachant. Le suivre dans son travail très particulier de falsificateur du réel sur une vingtaine d’années est alors un plaisir, d’autant qu’il évolue au fil des tomes et tente de progresser, dans sa vie professionnelle comme dans sa vie privée.
Les autres personnages contribuent également à la réussite des romans – petite mention aux meilleurs amis de Sliv, Maga et Youssef : souvent affirmés, parfois hauts en couleur, ils nous font rire et passer de très bons moments. On peut toutefois regretter que le récit ne les exploite pas assez : la narration étant interne, on ne les perçoit qu’à travers les yeux de Sliv. Ainsi, le personnage de Nina se révèle anecdotique alors qu’il présentait un réel potentiel romanesque : son rôle dans l’histoire et dans la vie de Sliv reste malheureusement limité.
Seul personnage peut-être que l’on aurait préféré ne pas connaître : Lena Thorsen. Garce d’une grande intelligence et d’une beauté presque surnaturelle – coucou le cliché –, assez horripilante, antipathique, glaciale et excessivement désagréable, elle ne semble exister que pour créer le conflit et freiner l’ascension professionnelle de Sliv. Son personnage reste mystérieux et intriguant jusqu’à une explication caricaturale et peu satisfaisante de son comportement dans le dernier tome. Un personnage plus nuancé aurait été préférable – en particulier dans le tome 2, où sa prétention et son mépris pour autrui sont sans bornes.
La trilogie des Falsificateurs constitue donc un divertissement honnête et prenant : la narration est si fluide que votre lecture sera finie en un rien de temps – affirmation quelque peu hyperbolique vu que les trois tomes représentent environ 1500 pages.
Bonne lecture !
—